Créer une entreprise sans activité : intérêts, démarches et obligations 

Créer une entreprise, sans commencer son activité immédiatement : cela peut paraître paradoxal. Et pourtant, c’est une stratégie parfaitement légale et parfois même judicieuse. Que ce soit pour réserver un nom commercial, anticiper un projet futur ou organiser un partenariat, il est tout à fait possible de créer une société « en sommeil », c’est-à-dire sans activité opérationnelle dès son immatriculation. Mais attention : cette inertie apparente n’est pas sans conséquences. Voici ce qu’il faut savoir avant de créer une entreprise sans activité. 

Est-il légal de créer une entreprise sans activité ? 

Oui, il est tout à fait légal de constituer une entreprise et de ne pas démarrer son activité immédiatement. 

L’immatriculation d’une société est une étape juridique qui confère à l’entreprise sa personnalité morale (dans le cas d’une société) ou son existence légale (dans le cas d’une entreprise individuelle). Mais cela n’oblige pas à exercer une activité économique immédiate. 

Il est donc possible de créer une structure sans chiffre d’affaires, sans salariés, sans contrats en cours, à condition de respecter certaines obligations déclaratives et fiscales, même en l’absence d’activité. 

Pourquoi créer une entreprise sans lancer immédiatement l’activité ? 

Les raisons de créer une entreprise sans activité immédiate sont nombreuses et souvent stratégiques : 

Anticiper un projet 

Vous avez un projet de lancement, mais vous n’êtes pas encore prêt : vous attendez un financement, une autorisation administrative, la fin d’un contrat de travail… Créer la société en amont vous permet de verrouiller la structure juridique et de commencer à préparer le terrain. 

Réserver un nom commercial ou une marque 

En créant la société, vous obtenez un numéro SIRET et un extrait Kbis, ce qui officialise votre nom auprès de l’INPI et protège votre identité commerciale. Cela peut éviter qu’un tiers ne s’en empare avant vous. 

Structurer une association ou un partenariat 

Créer la société en avance permet de fixer les règles du jeu entre associés (statuts, répartition des parts, mode de gouvernance), même si l’activité démarre plus tard. Cela sécurise les relations et facilite les démarches ultérieures. 

Participer à un appel d’offres 

Certaines entreprises sont constituées uniquement pour répondre à un marché spécifique, ou pour être éligibles à une subvention, un contrat public ou un dispositif fiscal. 

Quelles démarches pour créer une société sans activité ? 

Les démarches sont exactement les mêmes que pour toute création d’entreprise

  • Rédaction des statuts (si société), 
  • Dépôt de capital (même symbolique), 
  • Publication d’une annonce légale, 
  • Dossier d’immatriculation via le guichet unique formalites.entreprises.gouv.fr. 

La seule différence, c’est que l’activité réelle ne démarre pas immédiatement après l’immatriculation. 

Attention : même sans activité, la société est considérée comme existant juridiquement dès son immatriculation. 

Quelles sont les obligations d’une entreprise sans activité ? 

Même sans activité, une entreprise n’est pas invisible aux yeux de l’administration. Elle reste tenue de respecter plusieurs obligations, notamment : 

Les obligations fiscales 

  • Déclarations de TVA (même à zéro, si vous êtes redevable) 
  • Déclaration de résultat (même en cas d’exercice déficitaire ou nul) 
  • Paiement éventuel de la contribution économique territoriale (CET) (sauf exonération) 

Les obligations sociales 

Si l’entreprise a un dirigeant rémunéré (même sans salariés), elle doit déclarer les charges sociales correspondantes. 

Si personne n’est rémunéré, elle peut rester sans cotisations sociales, mais devra tout de même renseigner cette situation à l’URSSAF. 

Les obligations comptables et juridiques 

  • Tenue d’une comptabilité à jour (même sans mouvement) 
  • Dépôt des comptes annuels (pour les sociétés) 
  • Mise à jour du Kbis si changement de situation 

En somme : pas d’activité ne signifie pas absence d’obligations. 

Peut-on rester indéfiniment sans activité ? 

Non. La loi n’impose pas un délai fixe pour démarrer l’activité, mais en pratique, l’administration peut s’interroger si la société reste inactive trop longtemps. 

Au-delà de 2 ans sans activité réelle, l’entreprise risque : 

  • une radiation d’office par le greffe (notamment pour défaut de dépôt des comptes ou d’activité économique), 
  • un redressement fiscal si elle est soupçonnée d’abriter une activité dissimulée, 
  • des sanctions financières si elle ne respecte pas ses obligations déclaratives. 

Si vous savez que vous n’allez pas démarrer tout de suite, il peut être judicieux de placer volontairement la société en sommeil. 

Placer une entreprise en sommeil : une alternative encadrée 

Une entreprise déjà immatriculée peut décider de suspendre volontairement son activité sans la dissoudre. C’est ce qu’on appelle la mise en sommeil. 

Cela permet de : 

  • geler temporairement l’activité, 
  • continuer à exister juridiquement, 
  • réduire les obligations fiscales et sociales, 
  • garder le numéro SIRET et l’identité commerciale. 

La mise en sommeil est possible pour une durée maximale de 2 ans. Au-delà, il faudra soit reprendre l’activité, soit dissoudre la société. 

La déclaration de mise en sommeil se fait également via le guichet unique, en quelques clics. 

Quels risques si on ne respecte pas les règles ? 

Créer une société sans activité réelle peut être perçu comme : 

  • une société fictive (notamment en cas d’utilisation abusive), 
  • un outil de fraude fiscale ou sociale (blanchiment, fausse facturation…), 
  • un manque de transparence vis-à-vis des partenaires

Cela peut entraîner : 

  • des amendes
  • une radiation d’office
  • voire des poursuites pénales en cas d’usage frauduleux. 

Il est donc essentiel de formaliser votre projet, même s’il n’est pas encore opérationnel. 

Créer une entreprise sans démarrer immédiatement son activité est parfaitement légal, à condition de respecter les règles du jeu. Cette stratégie peut répondre à des objectifs précis : préparation, anticipation, sécurisation.  

Mais attention : une entreprise immatriculée, même inactive, reste une entité vivante aux yeux de l’administration. Elle doit être gérée, surveillée et déclarée. Si votre projet prend du retard, la mise en sommeil peut offrir un cadre temporaire protecteur. En cas de doute, mieux vaut consulter un expert pour éviter les pièges d’une inactivité… trop visible. 

(Crédit photo : iStock – Morsa Images)